7/10Bremen : les déjantés

/ Critique - écrit par Jade, le 02/08/2004
Notre verdict : 7/10 - Bremen, pour nous les hommes (Fiche technique)

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Bremen est un manga non seulement intéressant, mais aussi drôle, divertissant et s'adressant à un large public, sans pour autant tomber dans le n'importe quoi. Un shonen digne d'intérêt

Bremen est un manga quelque peu étrange. On y retrouve des éléments communs à tous les mangas, mais certains aspects sont assez originaux. Le sujet traité est assez déplacé, et le devient encore plus par la manière dont il est abordé.

Le hard rock. Ce mouvement fut l'objet de toute une révolution dans les années 80. Il faut croire que ceux qui ne sont pas de cette génération auront bien du mal à imaginer la portée du changement social véhiculé par cette musique. Contrairement au mouvement hippie, le respect de la vie et d'autrui est mis de coté, c'est l'individualisme qui prime dans cette nouvelle idéologie. Le hard rocker se moque de ses pairs, c'est un incompris qui chante sa rage.
Bremen : les déjantés
Bremen : les déjantés
L'idéal du chanteur rebelle qui exulte sa rage de vivre est de nos jours quelque peu dépassé, à mon avis. J'ai personnellement du mal à m'identifier à un égocentrique qui hurle dans un micro. Ce sera pourtant le sujet principal de Bremen.

Hino Reiji, 17 ans, est le fils d'un riche homme d'affaires qui le délaisse pour son travail. Du jour au lendemain, il décide de quitter sa maison pour aller faire fortune à Tokyo en tant que guitariste d'un groupe de rock. Sur la route, il rencontre Romio Kasuga, un jeune garçon de son âge. Je-m'en-foutiste, anarchiste, et violent, il vit la vie à fond, son seul mode de pensée étant d'écraser tous ceux qui l'empêchent d'atteindre son rêve. Quel rêve ? Lui-même ne sait pas vraiment en quoi il consiste, mais il est sûr d'une chose, tout le monde reconnaîtra son génie un jour où l'autre. Impressionné, Reiji lui demande de faire partie de son futur groupe de rock.

Dés les premières pages, le personnage de Kasuga fait penser à une autre forte tête : Eikichi Onizuka de GTO. Intellect faible, force brute et instoppable, mais surtout ce rêve ambitieux à la démesure du personnage. Leur débilité relative est d'ailleurs le moteur de tout l'humour du manga, omniprésent dans les deux oeuvres. Là où les deux héros diffèrent, c'est dans leur psychologie. Onizuka est un homme, avec des faiblesses assez prononcées, alors que Romio Kasuga fait clairement partie du monde des idoles, il est l'incarnation de l'esprit hard rock.

Mettre en scène un personnage aussi immoral et violent que Kasuga dans un manga pour jeunes adolescents requiert bien entendu des concessions. Ainsi, le jeune homme n'est pas aussi ego-centré qu'il prétend l'être, et se transforme parfois en défenseur de la veuve et de l'orphelin, chose facile pour lui qui se bat avec des plaques d'égout où des disques en vinyles sans distinction de poids. Mais il y a la un certain paradoxe qui pourrait nuire à la logique du manga. Cependant, Umezawa Haruto, l'auteur, s'en sort assez bien, grâce à certains talents de suggestion, en nuance parfaite avec l'esprit brutal de ses héros.

L'auteur est conscient de l'aspect dépassé de son sujet et semble l'utiliser à son profit. On ne sait pas vraiment à quelle époque se déroule l'histoire. L'on serait tenté de croire qu'elle a lieu dans un monde parallèle où le rock n'a jamais cessé d'être roi. De même, le style graphique quelque peu passé de mode ressemble à un clin d'oeil aux nostalgiques de cette ère musicale qui a du mal à bien vieillir.

Bremen est un manga non seulement intéressant, mais aussi drôle, divertissant et s'adressant à un large public, sans pour autant tomber dans le n'importe quoi. Un shonen digne d'intérêt, peut-être plus que la moyenne, car l'un des rares à vraiment offrir une vision unique de la société, et une réflexion assez originale sur ses extrêmes : il ne s'agirait pas de les éviter, mais de les combiner, à l'image du personnage de Ryo Hayama, batteur du groupe, qui vit dans un appartement luxueux et subvient aux besoins matériels du groupe tout en se rebellant contre la société nantie. On pourra conjecturer sur le degré d'hypocrisie à atteindre pour suivre un tel idéal, mais le débat reste ouvert...