7/10Love Hina

/ Critique - écrit par Nicolas, le 26/09/2003
Notre verdict : 7/10 - Todaï, ton université impitoyable (Fiche technique)

Tags : hina love manga akamatsu ken keitaro tome

A 30 ans, Ken Akamatsu semble toucher du doigt son rêve en émettant une série de mangas couverte de succès et désormais mondialement connue. Love Hina, premier grand titre du mangaka (après plusieurs courtes histoires comme « A Kid's Game for One Summer »), gagne très vite une importante popularité parmi la jeunesse japonaise et s'impose rapidement comme la nouvelle référence de la comédie romantique sur la scène manga, bientôt déclinée en série animée et même en jeu vidéo (sur Game Boy Color/Advance et sur Dreamcast, des jeux d'aventure réservés aux polyglottes et aux otakus) !
Love Hina
Love Hina
La sortie du dixième volume traduit en français, sur les quatorze que comporte la série totale, est une belle occasion de dresser un bilan de ce nouveau phénomène de la bande dessinée japonaise, et pourquoi pas de le faire découvrir aux potentiels amateurs du genre.

Alors qu'il n'était pas plus haut que trois pommes, Keitaro Urashima fit la promesse devant sa petite amoureuse qu'ils se retrouveraient tous deux à Todaï, la plus réputée des universités du Japon. Quinze années plus tard, désespérément sans copine, et à la suite d'un second échec à l'examen d'entrée, Keitaro est expulsé de chez lui. Pensant pouvoir être accueilli dans l'établissement de sa grand-mère, la pension Hinata, quelle n'est pas sa surprise de constater que le foyer s'est transformé en un dortoir exclusivement réservé aux filles. D'une maladresse maladive, Keitaro passe vite pour un pervers détestable, et manque de se retrouver à la rue. Jusqu'à ce que sa grand-mère le nomme à la direction de la pension...

Il est intéressant de constater que le succès de Love Hina ne se fonde pas sur l'originalité de l'histoire qu'elle présente, mais plutôt sur la justesse accommodante des inspirations de l'auteur. Le sujet n'est en effet pas sans faire penser à Maison IkkokuJuliette, Je T'aime » dans la langue de Bernard Minet), et le style humoristique lorgne assez du côté du Ranma 1/2, tous deux de Rumiko Takahashi. Ainsi, un jeune garçon régulièrement éconduit par la gent féminine devient propriétaire d'un pensionnat rempli de filles plus jolies et plus caractérielles les unes que les autres. Et le don incroyable de Keitaro consistant à se fourrer dans des situations très peu confortables à longueur de journée va vite lui poser problème. Il suffit parfois simplement qu'il entre dans une pièce pour se retrouver nez à nez avec une fille en petite culotte qui va moyennement apprécier de se faire reluquer par ce repoussoir à filles poignardé d'échecs scolaires. Catalogué comme un pervers irrécupérable, il n'est alors pas rare et même récurrent que le pauvre Keitaro subisse le tabassage en règle qui va devenir le principal gag au fil des épisodes.
Et la récurrence peut parfois payer ! Si le premier volume s'en retrouve un peu déconcertant, Keitaro empilant les gaffes avec une obstination des plus légendaires, la mayonnaise finit par prendre à partir du deuxième volume et le lynchage répétitif arrache enfin un sourire. L'évolution des relations garçon - filles, et le développement des personnages annexes y sont peut-être aussi pour quelque chose. Chaque pensionnaire affiche sérieusement un grain de folie qui ramène inévitablement aux références pré-citées, et en devient plus ou moins attachant. Je citerai de préférence Shinobu, la pré-adolescente un peu émotive, et Sû la jeune étrangère survoltée ; mais il est tout de même heureux de voir arriver de nouvelles têtes pour relancer l'intérêt alors que le côté réitératif du manga reprend le dessus. Ma pensée va à Mitsumi Otohime, l'alter-ego de Keitaro en terme de maladresse et de redoublement, fragile et naturelle tout en étant très directe, associée à la petite tortue volante (...) Tamago qui en devient une sorte de mascotte très étrange.

Le fil conducteur, la relation entre Keitaro et le personnage féminin principal Naru, se perd très souvent dans des banalités ou des impressions de déjà vu, noyé parfois dans des histoires annexes s'intéressant davantage aux personnages secondaires que sont Motoko ou Sû, et peine à revenir dans un cadre plus sérieux. Concrètement, l'histoire n'avance pas beaucoup et menace à la longue de lasser le lecteur, le côté répétitif de l'humour et des situations n'aidant vraiment pas. Chaque volume se ressemble d'une façon ou d'une autre, et la légèreté du thème abordé, bien loin de la réalité, pèse encore sur l'intérêt très instable du manga. Bien heureusement, il parvient à rester à un niveau suffisamment élevé pour laisser persister l'envie d'aller jusqu'au dénouement, avec l'espoir d'un regain d'inventivité dans les derniers volumes.
Le style graphique, en progression constante au fil des volumes, ajoute encore aux arguments de rapprochement avec l'oeuvre de Rumiko Takahashi, par l'allure fantaisiste que prennent les violences « affectives et physiques » infligées à Keitaro, le jeune garçon se faisant régulièrement expulser dans les airs suite à un coup de poing digne des grandes séries de batailles fantastiques. Ce même coup découlant d'un petit acte maladroit mais néanmoins déplacé qu'une jeune fille du tempérament de Naru ne peut supporter, qui plus est surprise dans son plus simple appareil. Une fibre comique qui permet à l'auteur de multiplier les phases un peu dévêtues avec une certaine ténacité.

Une série sympathique et fraîchement conçue, qui ravira certainement les fans du genre malgré le côté répétitif de l'intrigue et la légèreté du propos. L'histoire affiche parfois une certaine peine à rebondir et s'égare assez régulièrement dans des considérations mineures peu intéressantes, mais promet un certain nombre de bons moments, grâce rendue à des personnages somme toute attachants bien que très profondément typés.

P.S. : Myû.