8/10Le Marécage

/ Critique - écrit par juro, le 30/10/2006
Notre verdict : 8/10 - La galère des colocs (Fiche technique)

Embrouille, délire, re-embrouille, re-délire... On croyait les avoir perdu pour de bon après être apparu dans la meilleure nouvelle de L'Amour est une Protéine mais ils sont de retour : les colocataires du Marécage ! Inspiré d'expériences vécues, les aventures d'un groupe de quatre étudiants (et demi) sous forme de saynètes se révèlent complètement jouissifs par tant de trouvailles humoristiques. Choi Kyu-sok revient avec force dans cette nouvelle création bourrée de gags absurdes dans un microcosme estudiantin des plus ressemblants à la réalité vécue...

Plus qu'un toît...

Le Marécage
Le Marécage
À travers Le Marécage, plusieurs scènes de la vie quotidienne d'un groupe de jeunes hommes nous plongent dans la promiscuité étouffante de ces étudiants coréens en bandes dessinées. Dans cette chambre minuscule, où ils sont obligés de vivre à cinq, vont naître les situations les plus irréelles, mais aussi les plus drôles. Le mystérieux Choe-kun, étudiant boursier qui dénonce la société, contraste parfaitement avec la démence de Jae-hon, coupe au bol, tee-shirt rayé et rire nerveux. Alors que le sympathique Jeong-kun se voit livrer la totalité des tâches ménagères, Mong-chan, obnubilé par le travail scolaire vit carrément à l'intérieur de son ordinateur. Pour compléter le tableau, un cinquième colocataire fait son apparition, un cerf opportuniste et squatteur dont le cynisme n'est pas sans rappeler celui du manhwaga.

Cinquante-quatre histoires de quatre planches pour presque autant de rires et de sourires. Avec Le Marécage, la collection Hanguk nous démontre une fois de plus que les one-shots coréens sont ingénieux et présentent souvent une imagination débordante. A travers, ces saynètes de la vie quotidienne, l'auteur tourne à sa sauce des histoires avec beaucoup d'humour et de dérision sur des situations réellement vécues dont il développe la réalité lors des bonus de fin. Personnification des objets de la vie quotidienne, galères pécuniaires, plaisanteries insensées, moment de solitude drolissime ou tentative de séduction à se rouler par terre... le gros panel des situations du Marécage s'avèrent posséder un puissant potentiel de déformation des zygomatiques.

Un tout !

Sans la naïveté qui caractérise habituellement le genre, Le Marécage offre un ton à mi-chemin entre l'adulte sérieux et l'adolescent déjanté. Les personnages n'en sont que le reflet délicieux. Les cinq personnages présentent des caractères ridicules s'additionnant pour tomber dans un gigantesque foutraque à qui mieux mieux sera le pire d'entre eux. A ce jeu, les principaux prétendants doivent choisir entre l'irrésistible Jae-hon et le cerf, magnifique parasite animalo-humain de bêtise et d'arrivisme sorti de nul part. Le manhwaga offre une succession de situations fantastiques, cocasses, improbables, tournant la vie quotidienne du moment de gloire au moment de « loose », trompant son lectorat sur la chute à chaque fois.

Le manhwaga développe plusieurs styles de dessin et de colorisation comme dans L'amour est une Protéine. Incorporant des couleurs au ton pastel dans des dessins qui évoluent du tout au tout, Choi Kyu-sok délivre une oeuvre riche. Passant d'un SD expressif et particulièrement réussi à des images travaillées qui ne sont pas sans rappeler les portraits de Remember par instants. Mais toujours pour mieux retomber derrière. Si le trait peut sembler hésitant parfois, c'est pour mieux s'adapter à la situation mais il est certain que certaines ont été plus travaillées que d'autres.

On pourra noter de petits clins perpétuels d'oeil à L'Amour est une Protéine mais Le Marécage représente une oeuvre à part entière à prendre comme un très bon moment de rigolade sans équivalent dans le domaine. A lire sans hésiter.