7/10No Man's Land

/ Critique - écrit par Kei, le 17/02/2006
Notre verdict : 7/10 - Mon nom est personne (Fiche technique)

Tags : man land arte saison francais moati histoire

Et un manga américain ! Un !
La phrase précédente vous fait tiquer ? Si vous aviez No Man's Land entre les mains, ce n'est pas cette phrase qui vous dérangerait mais le nom des auteurs : Jason DeAngelis et Jennyson Rosero. Des noms forts peu japonais en vérité, et très américain. Nous avions déjà eu droit au manga français, voici donc venir un de ses homologues d'outre Atlantique. En toute logique, le mot manga ne devrait s'appliquer qu'à la bande dessinée japonaise, mais ce que j'ai entre les mains en est tellement proche, du moins dans la forme, que l'on peut difficilement le qualifié autrement. Format 13*18, sens de lecture japonais, trames en noir et blanc, mentons pointus, rien ne manque à l'appel. Pourtant, on sent dès les premières pages l'influence de la bande dessinée américaine.

Bienvenue à New Haven, rebaptisé New Hades depuis peu : une ville ni déserte ni fantôme, mais dont les habitants se terrent dans leurs maisons. Tout homme serait déstabilisé en arrivant dans une telle ville, mais pas John Parker. Il se dirige droit vers le bureau du sheriff, qui ne lui ouvre qu'après avoir confirmé son identité. S'ensuit une conversation étrange, où il est question de meurtres, de cauchemars, et d'une ombre qui serait descendue sur le pays. Un cri terrible retentit, signe d'un nouveau meurtre. L'affaire est conclue : John Parker réglera le problème pour la somme exorbitante de 1000$. En bon professionnel, il ne se laisse pas attendrir par la petite fille maculée de sang, qui lui dit que « quelqu'un a fait du mal à sa maman » en désignant un cadavre encore fumant, éviscéré. Il sort son arme, un « buntline special » avec un canon de 16 pouces et vise le coeur. Dans le mille. La petite fille n'en semble pas pour autant affectée. La seconde balle qu'il lui loge dans la tête ne lui fait pas plus d'effet, mais l'innocente gamine se métamorphose en un monstre hideux...

Cowboys et vampires. Un mélange inattendu qui change agréablement de la traditionnelle Angleterre victorienne. Ce n'est pas tous les jours qu'un manga se paye le luxe d'être original, alors ne boudons pas notre plaisir. L'histoire en elle même n'est pas très intéressante, car elle rappelle dans sa forme Trigun : un passé mystérieux, un héros manipulé, un ennemi puissant et des hommes impuissants, faibles et crédules.

Graphiquement, on est à des lieux des standards du shônen. Alors que le genre est caractérisé par une absence quasi totale de trame, et un dessin simpliste, on a du mal à trouver dans No Man's Land des zones totalement blanches, tout regorge de détails. Style manga oblige, il n'y a presque pas de décors, mais suffisamment pour planter le contexte et bien faire comprendre où l'on se trouve. On sent tout de même l'influence du dessin classique, surtout pour ce qui est des personnages. A part le héros et le grand méchant, qui sont tous les deux beaux, les autres personnages, hommes ou femmes (encore que celles si répondent aux abonnés absents dans ce premier tome) sont normaux, voir moches : ventripotents, sales, mal rasés, peu soignés, vulgaires, chauves ou degarnis, ils sont tous humains, et bien loin des habituels stéréotypes. Le character design participe lui aussi activement à cette impression de réalisme, notamment grâce aux vêtements, qui sont tous ce qu'il y a de plus normaux : on est de retour dans le monde du western spaghetti, avec les codes vestimentaires auxquels on est habitué.

Mais le meilleur dans No Man's Land, c'est le rythme, parfaitement maîtrisé. Pas de grandes pauses, pas d'agitation inutile, pas de grande scène comique ni de SD à tout bout de champ. Le scénariste connaît son affaire et sait ménager le suspense tout en gardant du rythme. Je n'avais plus lu un tel manga depuis lontgtemps.

Inutile de parler de l'édition, irréprochable, et qui vaut largement son prix, par ailleurs pas tant élevé. Ki-oon à fait un excellent travail.

A la fin de ce premier tome, on ne se sent pas transformé par ce que l'on vient de lire, mais on a passé un très bon moment. Le scénario un peu faible pour le moment est sympathique mais on attend un peu plus de consistance, surtout à coté du travail graphique assez exceptionnel. Les puristes lui reprocheront de ne pas être un vrai manga, les autres apprécieront tout simplement. Un deuxième tome plus profond ferait sans aucun doute augmenter la note, qui représente pour le moment le plaisir de lecture, en faisant abstraction du manque de profondeur.